Que de merveilles ! Brahms est le grand maître de la musique de chambre. Tout l'y portait : une grande rigueur de l'écriture, un goût très sûr pour le mélange des timbres, un tempérament méditatif et poétique qui convient si bien à ce genre intime par excellence. Il n'y a que dans le quatuor à cordes qu'il cède la supériorité à Beethoven. Partout ailleurs, on trouve ce parfum inimitable, fait de mélancolie souvent, d'héroïsme parfois, qui semble vouloir faire revivre en nous un temps bienheureux mais à jamais perdu, et qui peut-être n'a jamais existé que dans nos rêves.
C'est
une combinaison instrumentale inédite dans laquelle Brahms démontre une
fois de plus un goût parfait, et très inventif, dans l'association des
timbres. C'est surtout une des merveilles d'une production de musique
de chambre dont Brahms est peut-être le plus grand maître.
Le
premier mouvement est inhabituellement un andante. Voici la forêt
germanique, doucement éclairée par la chaude lumière du cor, tel un
soleil d'automne à travers de feuilles jaunies, et qui ménage des zones
ombragées propices aux légendes. Peu de menace pourtant ici, mais une
douce rêverie, à peine mélancolique. Le scherzo qui suit, vigoureux et
plein d'entrain, fait la part belle au cor évocateur de scènes de
chasse. Ce sera le cas aussi du finale. Mais le joyau de l'oeuvre est
son mouvement lent, magnifique déploration pour la mère du compositeur,
corniste, récemment décédée au moment de la composition. Le grave
ténébreux du piano, la plainte du violon, le chant cuivré, presque
humain, du cor, fusionnent leur timbres dans une douleur pleine de
noblesse. Un très grand moment de musique de chambre, qu'on écoutera
impérativement dans la version Dalberto (piano), Amoyal (violon), del
Vescovo (cor).