Frédéric Chopin

Frédéric Chopin

 

24 préludes opus 28

Les 24 préludes opus 28 de Chopin sont généralement considérés comme le cef d'oeuvre de leur auteur. Le titre de prélude n'indique rien d'autre que des pièces courtes, parfois très courtes (le 20ème fait 11 mesures), mais pouvant se rattacher à d'autres genres (par exemple le 13ème est un nocturne). Ils ne servent pas préparer une autre pièce, mais ont visiblement la vocation de s'enchaîner les uns aux autres, le dernier de la série assumant la fonction de catastrophe terminale, soit le contraire même de l'idée de prélude. De fait, si cette oeuvre présente une unité qui va bien au-delà de la varieté des climats inhérente au parcours de toutes les tonalités par le cycle classique des quartes descendantes alternant mode majeur et mode mineur, et qui rend illusoire toute exécution fractionnée.  Une trajectoire générale peut être dégagée, et celle-ci est éminemment tragique. Au début les préludes en mode majeur sont vifs et printaniers, ceux en mode mineur très lents et accablés. Peu à peu, les préludes en mode majeur tendent à l'étirement, à la dépression, tandis que ceux en mode mineur, de plus en plus sombres et agités, prennent les commandes du parcours, menant implaccablement à la conclusion du dernier d'entre eux. Plusieurs préludes partagent en outre une obsession pour les notes répétées en goutte de pluie, drainait une irrépressible mélancolie.

  1. Ut majeur, agitato : dans le ton paradigme, une musique passionnée au rythme bousculé, comme une aspiration à la lumière.

  2. La mineur, lento : d'une désolation sinistre soulignée par les accords obstinés à la main gauche, avec une très pâle lueur à la fin.

  3. Sol majeur, vivace : très virtuose et agreste, comme un sourire printannier.

  4. Mi mineur, largo : des accords répétés en goutte de pluie, un chant distendu à base essetiellement d'intervalles de secondes qui résonnent comme des sanglots : ou comment faire de la musique géniale avec un matériau très simple.

  5. Ré majeur, molto allegro : les deux mains à la poursuite l'une de l'autre, dans un jeu virtuose aux modulations instables, à la recherche d'une certitude qui s'échappe. L'atmosphère déjà se tend.

  6. Si mineur, lento assai : très connu, ce prélude laisse le chant à la main gauche, qui tente inlassablement de monter vers l'aigu, pour retomber dans l'accablement, tandis que les gouttes de pluie envahissent la main droite.

  7. La majeur, andantino : pour la première fois, le prélude majeur est court et lent, le suivant en mineur sera long et rapide, la trajectoire de l'oeuvre s'incline vers le tragique. Ce prélude est un début de valse, hésitant et irrésolu, d'un charme inconsistant.

  8. Fa dièse mineur, molto agitato  : très sombre, ce prélude est basé sur une cellule unique (accord brisé à la main gauche, pluie de petites notes à la main droite parmi lesquelles émerge le chant en rythme pointé) qui se répète du début à la fin. C'est une course effrénée vers l'abîme.

  9. Mi majeur, largo : solennel et quelque peu pompeux, ce prélude dégage une grande puissance quasi orchestrale.

  10. Ut dièse mineur, molto allegro : en opposition totale avec le précédent, ce prélude passe délicat et immatériel comme un elfe.

  11. Si majeur, vivace : on retrouve ici un peu de la sève du premier et troisième préludes, mais dans une ambiance rêveuse, comme un souvenir de temps plus heureux.

  12. Sol dièse mineur, presto : pour marquer la moitié du recueil, un prélude d'une virtuosité féroce, d'une agitation éminemment tragique. Des notes répétées suggèrent encore une fois la pluie, mais il s'agit cette fois d'une tempête !

  13. Fa dièse majeur, lento : un nocturne d'une beauté sublime. Sur une harmonie délicate tissée par la main gauche, se déploie un chant mélancolique et rêveur, souligné en son milieu par un épisode central più lento en apesanteur.

  14. Mi bémol majeur, allegro : encore un nocturne, mais cette fois pour évoquer les terreurs nocturnes. Les deux mains à l'unisson décrivent une menace qui s'approche inéluctablement, avant d'éclater fortissimo et de se résorber dans le silence. Il existe une édition dans laquelle Chopin a indiqué Largo au lieu d'allegro, ce qui rend cette courte pièce encore plus impressionnante.

  15. Ré bémol majeur, sostenuto : le plus long des préludes, le plus connu aussi. En première section, le chant, d'une beauté éperdue, s'appuie sur des notes répétées en gouttes de pluies. Celles-ci sont à l'origine du deuxième épisode qu'elles envahissent tout entier, dans une ambiance très sombre, venant de très loin comme de sombres souvenirs remontant à la surface de la conscience sous l'effet de la mélancolie de la pluie. Le chant initial revient, plus dépressif, pour conclure le morceau.

  16. Si bémol mineur, presto con fuoco : de brutaux accords nous tirent de le rêverie mélancolique du précédent prélude. Pas d'état d'âme ici : une course à l'abîme, d'une redoutable difficulté, sans la moindre lumière.

  17. La bémol majeur, allegretto : sur un balancement ternaire, voici une promenade dans un pays fleuri et enchanteur, mais les merveilleuses modulations n'indiquent que trop bien son caractère illusoire.

  18. Fa mineur, molto allegro : c'est le prélude le plus théâtral, une véritable scène de tragédie, dans laquelle deux personnages de déchirent sans la moindre trace de sentimentalité : des traits virtuoses et des accords tranchants et froids.

  19. Mi bémol majeur, vivace : il reprend un peu l'esprit du 17ème prélude, mais de façon beaucoup plus virtuose. C'est le dernier prélude en mode majeur a être réellement actif.

  20. Ut mineur, largo : le plus court des préludes, un des plus saisissant. Il est constitué de trois phrases presques similaires, mais dans des nuances décroissant par palier (fortissimo, piano, et pianissimo, avec un crescendo pour conclure), en choral d'une saisissante religiosité funèbre. Avec ce prélude, l'oeuvre se tourne définitivement vers sa conclusion tragique.

  21. Si bémol majeur, cantabile : un nouveau nocturne, au chant sans réélle consistance, qui s'achève sans véritablement avoir commencé. La fin prépare le prélude suivant.

  22. Sol mineur, molto agitato : le prélude le plus tragique jusqu'ici, d'une noirceur épouvantable. La main gauche domine, en féroces octaves qui menacent et rugissent, la main droite, rapidement vaincue après un bref combat, cherche en vain à s'échapper dans l'aigu.

  23. Fa majeur, moderato : volontairement inconsistant, sans chair, sans émotion même, n'allant nulle part et n'aboutissant effectivement à rien : le drame s'est noué définitivement au prélude précédent, l'oeuvre n'attend plus que son coup de grâce.

  24. Ré mineur : allegro appassionato. Soigneusement préparé par les préludes précédents (tous les préludes en fait), voici le plus noir, le plus halluciné, le plus tragique : le plus beau surtout. Sur des accords brisés inlassables de la main gauche, chevauche le cavalier de la Mort, semant terreur et désolation. Par de fantastiques modulations, le voici en mode majeur : il sourit, il s'approche. Le voici. Il frappe, sur une descente vertigineuse de tout le clavier. Le rideau tombe sur les trois notes répétées finales, comme trois coups de marteau qui n'ouvrent sur aucun avenir, aucune perspective, dans une désolation définitive.

    La discographie des Préludes est très riche, mais toujours dominé par la version mythique d'Alfred Cortot enregistrée avant-guerre. Le respect du texte n'est pas scrupuleux quant à la lettre, mais l'alchimie des sonorités et des tempis, ce sentiment de re-création permanente rendent pleinement justice à l'esprit de l'oeuvre. L'un des plus grands disques de piano de l'histoire...


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