Schubert : la musique de chambre

Schubert


Quatuor en ré mineur D810 "La jeune fille et la Mort"

Ce quatuor, un des plus grands jamais écrits (mais au langage si profondément différent de ceux de Beethoven) fait partie, avec la symphonie Inachevée, les deux sonates en la mineur et la sonate en ut mineur, des oeuvres instrumentales les plus noires de Schubert. Le titre de "Jeune Fille et la Mort" est justifié, non seulement par l'utilisation du thème du lied éponyme dans le deuxième mouvement, mais par le climat particulièrement morbide de l'ensemble de l'oeuvre, renforcé par les sonorités volontiers décharnées des cordes.

Le premier mouvement, sauvage, est plongé dans les terreurs nocturnes. L'incipit, inoubliable, saisit l'auditeur à la gorge et ne le lâchera plus. La progression musicale qu'il initie tourne court très vite : il n'y aura ni résolution ni même évolution, mais resassement perpétuel de cette tempête de l'âme. La coda, remarquable par l'utilisation des contrastes forte-piano pour renforcer la tension, semble s'éteindre dans la nuit.

Le deuxième mouvement conserve exceptionnellement le mode mineur, privant de ce fait le majeur de toute apparition durable dans l'oeuvre. Le thème est une adaptation du choral de la Mort dans le lied "La jeune fille et la Mort" D.531 Par rapport à la version piano et chant, le son dénudé des cordes accroît le sentiment funèbre qui s'en dégage. Les variations qui suivent ne transforment pas le thème, qui reste toujours parfaitement audible et renforce ainsi son pouvoir de fascination hypnotique, tel un regard de serpent. Les premières variations, tourmentées, peuvent être vues comme un refus. L'arrivée du majeur, loin d'apporter le réconfort, apporte un sucroît de désolation. Le retour du mineur conduit à un sommet d'intensité rendu en core plus poignant par le decrescendo qui le suit. La musique, de plus en plus douce et ténue, semble venir de lointains confins. La résignation se mue en désir de mort dans les dernières mesures, d'une paix irréelle.

Le scherzo renoue avec les tourments du premier mouvement. Son thème rappelle de façon étonnante le leitmotiv des Niebelungen dans l'Anneau du Niebelung de Wagner. Le trio serait insignifiant s'il n'était le seul moment détendu de l'oeuvre.

Les cordes, plus acides que jamais, lancent la chevauchée du finale. Ce mouvement présente une ressemblance frappante, tant par son esprit que par son plan, avec le finale de la sonate en ut mineur. Une danse macabre donc, échevelée, implacable et grinçante, et sombre couronnement de cette oeuvre intransigeante.
 


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